L’architecture de l’Épire

L'Épire, située entre la rivière Aoos et la mer Ionienne, comprend quelque 46 villages connus sous le nom de Zagoria ou Zagorohoria, dispersés dans les magnifiques chaînes de montagnes du Pinde.

Cette zone de forêts et de hauts sommets, de gorges, de rivières, de lacs et de ponts en pierre offre une toile de fond à certaines des architectures de montagne les plus uniques. Les maisons des villes et villages sont construites avec les matières premières disponibles sur place; principalement la pierre, le bois et l’ardoise qui en fait le style d’architecture traditionnelle caractéristique de cette région. Les artisans et constructeurs ont construit non seulement des maisons avec des murs en pierre et des toits en ardoise, mais aussi des ponts en arc reliant les villages, des églises impressionnantes, des places en pierre pavées, des ruelles et des fontaines. Le résultat est un mélange des villages dans leur environnement naturel. À ce jour, ces structures en pierre restent bien conservées, donnant l’impression que le temps s’est arrêté tout en incitant à protéger ce patrimoine architectural.

En raison de son irrégulière topographie, avec de hauts sommets, des pentes abruptes, des gorges et des rivières, cette zone n’était pas toujours facilement accessible. Les ponts en pierre voûtés qui reflètent le savoir-faire de ses constructeurs ont été construits pour relier les différentes villes et villages coupés les uns des autres pendant les fortes chutes de neige hivernales.

Maison moderne traditionnel à Papiggo, dans l’ouest de Zagoria Crédit Photo: Costas Tavernarakis

Ces villages construits en pierre rappellent des châteaux tous couverts de couleur grise et bleu, et d’ardoise. Chaque maison est généralement rectangulaire, avec un ou deux étages et est entourée d’un grand mur en pierre avec une grande porte en bois massif. Cela offrait une protection autrefois contre les cambrioleurs et aussi contre les conditions météorologiques difficiles. Les maisons ou château particuliers les plus riches, généralement construits autour de la place du village, avaient un balcon «hagiati» depuis lequel à travers les fenêtres fermées le propriétaire pouvait observer la vie quotidienne.

Toutes les rues étaient couvertes de dalles de pierre bien fixées, avec des dalles plus hautes que d’autres. C’est le résultat de calcules pour donner aux personnes et aux animaux une meilleure adhérence lorsque les routes sont couvertes de neige et de glace. C’est pourquoi les pierres ne dépassent que lorsque la route est inclinée.

Au fil du temps, les artisans du bois et de la pierre d’Épire, et en particulier de Zagoria, ont développé davantage leurs compétences techniques, leur permettant de vivre de leur artisanat et contribuant à propager ce style de construction.

Pont Kokorou Crédit Photo: Costas Tavernarakis

Pendant l’occupation turque, les villages de Zagoria ont prospéré avec la construction de maisons à deux étages, de fontaines en marbre, de ponts voûtés et de magnifiques églises. Il existe de nombreux exemples de ce type de construction: Kalogeriko avec ses trois arches, juste à l’extérieur du village de Kipi, est le pont de pierre le plus célèbre de cette région; Le monastère d’Aghia Paraskevi à Vikos, construit au bord d’un ravin remonte au 15ème siècle et est un monument bien connu. Il y a aussi Skala, un sentier pavé reliant le village de Vradeto à Kapesovo. Ce sont des exemples de cette architecture traditionnelle qui survit encore aujourd’hui.

Eglise à Mikro Papiggo  Crédit: Costas Tavernarakis

Les marchands voyageaient à travers l’Épire à destination et en provenance de l’Europe. Ils ont ainsi répandu la renommée des artisans vivant dans ces petits villages du Pinde. Les artisans de l’Epire voyagèrent à travers la Grèce, les Balkans et l’Europe et furent payés généreusement pour leur travail. Ils ont développé des guildes en fonction de leurs compétences – maçons de pierre, artisans du bois, peintres. Leurs connaissances et leurs compétences ont été transmises de génération en génération dans le plus grand secret, et ils ont même crée leur propre langue. Partout où ils sont allés, ils ont rapporté avec eux certains des meilleurs exemples de d’artisanat. Dans leurs intérieurs richement décorés, on pouvait reconnaitre des exemples de techniques venant de Vienne à Istanbul.

Au fil des ans, l’imagination fleurit autour des nombreuses structures de l’Epire. L’une d’elles concerne la légende du pont d’Arta, le pont de pierre qui traverse la rivière Arachtos près de la ville du même nom. Ce pont est devenu le sujet d’un récit folklorique bien connu. L’histoire raconte que pendant l’occupation turque, le commandant turc a ordonné la construction d’un pont sur la rivière. Dans un esprit de résistance, les constructeurs ont démoli chaque jour ce qu’ils avaient construit la veille. Le commandant a alors menacé de tuer le chef du chantier et sa femme si le pont n’était pas terminé. Selon la légende, un oiseau à la voix humaine a dit au chef du chantier de sacrifier sa femme pour assurer des fondations solides au pont. Mais la femme jeta une malédiction sur le pont. Finalement, elle céda et accepta le sacrifice lorsqu’elle apprit que son frère utiliserait également le pont.

Papingo  Crédit Photo: Dimitris Karagiorgos

L’Épire reste un lieu touristique populaire. Outre sa beauté naturelle, son patrimoine architectural reste un pôle d’attraction touristique mondial.

Crédits photo de couverture:Γιάννης Χουβαρδάς